Le mystère végétal de Santa Clara, Cal. III
3eme episode
Des nouveaux rebondissements ou la critique de la méthode intuitive…
Le moment est venu de dévoiler que cette facétie bénévole ayant a l’origine une modeste démarche de taxonomie arboricole, contient un second acteur personnage, non moins beau, mystérieux ou exotique que le touffu premier violon ayant reçu le préfixe aujourd’hui sanctifie d’AFRO, dans le complet d’Afrocarpus Gracilior… Mais ne nous sommes pas tous d’origine africaine ? Enfin pour y rester dans les bois, ce deuxième violon est un magnifique spécimen de haute taille, tronc rouge et puissant, creusé par des profondes rides, a couronne dominante et feuillage abondant a plusieurs reflets. Quoique dans l’espace publique, pendant que le Gracilior fait anoblir ma gite, le second larron lui donne parfaitement la réplique. de l’autre côté de la rue.
Grace au distingué dendrologue (appellation de loin plus alléchante que le pénible spécialiste d’arbres) et benevolent ami, A.D., le deuxième volet de la petite énigme de l’avenue Mauricia, a Santa Clara (USA), l’identité de l’arbre a tronc écarlate, fut éclaircie. Il semble (dans les sciences la précaution tient lieu de garde-fou) qu’il s’agit de l’Eucalyptus à écorce de fer, Eucalyptus sidéroxylon ou encore Ironbark rouge ou Mugga (dénomination aborigène originaire de l’Australie). Plus que je m’avance dans la riche séquence des noms suggestifs plus que je me laisse convaincre de la justesse des vues, perçantes et résistantes à la contre-enquête, de mon ami. Faut-il avouer que dans ce procès ardu d’identification j’ai éprouvé, MOI AUSSI, avec succès une expérience personnelle de plus haut niveau qui m’a permis de court-circuiter mon déplorable ignorance et d’arriver à des conclusions apparentées aux celles de mon mentor es botanique et zoologie, le même A.D. mentionné plus haut ? Après un combat acharné avec ma modestie innée je me suis décidé de me déclarer, de tout dire dans cette période de franc-parler où les gens, EUX AUSSI, n’hésitent pas de faire des confessions publiques, souvent écœurantes avec un entrain maladif. Mais, il
faut vivre avec son temps et même hurler avec les loups tout en pensant à ce qu’on a envie a dire et apprendre à le garder pour soi. Taisons nous d’une façon active car on vient d’atterrir dans un temps de persécution verbale ou les BONS aiguisent les couteaux et sèchent les fagots. J’essaye d’arriver au point. Il se fait que parmi mes divers points de chute ou pied-à-terre si on veut, j’en ai un dans l’ancien Royaume des Croisées à Saint Jean d’Acre où chrétiens et musulmans connurent un courte période d’entente cordiale rendue probablement possible par l’extermination préalable et sanitaire des Juifs sur l’entière étendue de l’ancien pays de Canaan répondant déjà au sobriquet de Palestine. Les noms changent !
A une centaine de mètres de ma résidence placé au septième et dernier étage, joli numéro et jolie position, d’un immeuble exagérément sensible aux séismes, commence une route se dirigeant Nord-Est qui lie ma ville d’adoption avec la magistrale Haïfa-Rosh Hanikra. Cette dernière est un segment de l’avenue côtière se prolongeant virtuellement de Gaza jusqu’au Tyr et Sidon dans l’ancienne Phénicie et même plus loin encore au nord vers la ville syrienne de Latakia. Un joli morceau ! L’importance de cette avenue, glorieuse dans l’antiquité, est certainement nulle aujourd’hui car les touristes n’arrivent pas en masse au Liban et du tout en Syrie, sauf quelques suicidaires. Quant aux israéliens, nomades invétérés par tradition, leur présence est inopportune par définition! C’est aussi vrai que pour l’instant et même pour longtemps les touristes n’arriveront plus en foule nulle part. Les extravagances en bateau a cinq étages pour des vieillards pleins aux as et sur le bord de l’Alzheimer, sont révolus.
J’avais pris l’habitude de faire la bicyclette sur cette route quoique j’étais tourmenté par la déplaisantes prémonition de me voir désossé sur piste à la manière d’un canard au fameux Tour d’Argent ! Je pédalais de mon mieux, c’est-à-dire besogneusement, tout en me colletant sans arrêt avec la sensation de commettre une monumentale connerie. J’utilisais les bas-côtés de la chaussée, manifestement diminué par la peur, dans un état d’angoisse constante, La route qui était assez étroite, ayant une voie par direction et une ligne de séparation pleine, ne manquait pas en étranglements, virages, stations de bus mal à-propos, dos d’ânes et trous des tailles différentes. En plus elle était l’arène favorite d’un groupe de de psychopathes qui se croyaient capables de rendre des points à Lewis Hamilton. Ils fonçaient au volant de leurs risibles tacots sans peur ni mesure et surtout sans raison. Chaque fois que je frôlais la déchéance je jurais dans ma barbe de ne pas recommencer quoique cette route insignifiante se targuait des quelques importants appâts.
Sur la gauche a l’entrée d’un village au nom glorieux de Bustan Hagalil il y avait la riche pépinière Ben Yshai ou j’achetais mon vert. Un peu plus loin sur la droite se trouvait dans un superbe jardin persan la maison du fondateur de Bahaïsme. Il semble qu’il s’agit d’une confession douce, syncrétique, tolérante et spirituelle qui se fit naturellement taxé d’hérétique. L’accusation fait aussi service de compliment car l’hérésie, une bonne
hérésie, est souvent la porte du passage qui mène d’une religion à l’autre. Ici c’en fut le cas. Baháʼu’lláh, créateur et prophète du Bahaïsme s’est échappé de son Iran natal, haute terre des Mollahs agressifs, la mort aux trousses il y plus d’un siècle et demi. Il en est mort depuis mais il en reste toujours de quoi rêver à l’impossible possibilité que sa doctrine étonnement œcuménique, utopique et humanitaire s’imposera un jour dans l’ancien royaume d’Ahura Mazda, le Dieu Paresseux! Mentionner que des milliers d’Arabes musulmans vont à l’occasion de leurs hyménées s’immortaliser, a l’aide des photographes professionnels, ensemble avec la fraîche épouse sur le devant, et même dans le dedans, de ce jardin à l’honneur d’un méga hérétique qui accumula autant des fatwas qu’à rendre S. Rushdie jaloux pour toujours? Je ne pense pas qu’il soit nécessaire quoique je suis enclin de considérer ce choix sentimental et esthétique une preuve inébranlable que la tolérance va régner une fois dans le monde.
Et pour en finir cette même route dangereuse aboutissait à un croisement qui est très proche du kibboutz capitaliste Shomrat, où il y a eu dans le passée un viol a écho national et ou on vend maintenant des fromages à la françaises à prix d’or. Quoique je n’aie pas la moindre envie de coopérer avec des arnaques il m’arrive que je me laisse aller et que j’achète quelques morceaux car la chair est faible. Tout ceci explique mes occasionnelles récidives sur la voie de la peur malgré les angoisses que ces périples m’inspirent. J’ai failli oublier un détail d’importance capitale. La route à frissons, est bordée des deux
côtés par des rangés des magnifiques eucalyptus centenaires. C’est sur la base des souvenirs confus, que j’avais gardé de ces géants d’une autre monde, (ils étaient originaires d’Australie bien sûr) que j’ai pu ou cru flairer, en apprenti limier, l’identité des expatriés de Santa Clara. C’est le point que je tente de faire! Mais je mets le chariot devant les quadrupèdes. La photo de l’endroit significatif que j’ai péché dans le fonds de commerce de Google Maps m’a bien pavé la route ! Il est possible que les eucalyptus qui ornent et qui marquent la voie en question qui s’appelle d’ailleurs Boulevard Manof (ou route 8510, attention! secret d’état) appartient à l’espèce d’Eucalyptus Camaldulensis ou Red River Gum qui doit être la plus répandue des autres 80 espèces CULTIVÉES dans le pays! Ils, les camaldulensis, ont des feuilles longue et lancéolées et l’écorce lisse,gris pâle allant jusqu’au roux mauve, qui se détache en fragments ou longues bandes en laissant le tronc
dans un état de striptease avancé. Malgré les apparences cette mue est fonctionnelle. Elle crée de place pour la nouvelle écorce subjacente, qui apparaît souvent cramoisi de gêne si on veut pousser l’anthropomorphisme a l’extrême. A la première vue l’eucalyptus camaldulensis n’a pas trop de points communs avec les majestueux inconnus de Santa Clara sauf la taille. Mais si la première vue était toujours la bonne les gens pourraient éviter les frais du divorce! L’exemplaire de l’Eucalyptus a écorce de fer ayant conduit à cette recherche hystérique avait, je répète, l’écorce épaisse, irrégulièrement craquelée, couverte des taches gris noir séparées par des sillons roux brique creusés par une résine qui sourdait du tronc. Ses feuilles ovales à bord lisse avec dessus vert-bleu et dessous vert-pâle s’attachent, pétiole contre pétiole, de deux côtés de la tige pendant que le tronc ne manifeste aucun penchant pour la nudité (temporairement !!! en réalité tous les eucalyptus changent de peau). Et malgré tous ces contre-arguments au moment quand j’ai touché la surface huileuse d’une feuille et que j’ai reconnu la forme en tronc de cône renversé du fruit la vision de l’allée impériale du boulevard Manof, alias route 8150, surgit dans ma mémoire. Le declic fut impressionnant! Il se peut que l’expatrié de Santa Clara soit AUSSI un des 700 especes d’eucalyptus ? Bien sûr. que la lettre de mon ami confirmant mes soupçons m’apporta une énorme joie. MOI AUSSI donc, je me suis dit frémissant
de fierté, j’ai vu le nord ! Je étais sur le point de m’administrer un jet de compliments d’avoir eu une si brillante idée quand j’ai entendu un humm irrité dans ma tête. Mais qui est là ? j’ai crié sans voix dans le même endroit. . C’est moi le Grand Dieu Pan me répondit une voix chevrotante ne manquant pas de dignité. Rappelle-toi, dit-il sérieux comme un pape, que les Dieux Grecs n’aiment pas les gens heureux et détestent les vantards. D’autant plus qu’un impie comme toi n’a pas droit aux visions, n’en parlons plus des illuminations! Ta prétendue solution d’une moitié du mystère végétal se basant sur des associations bancales n’était que le fruit d’une coïncidence sans valeur doublé d’une ignorance sans limites. Ce fut une coïncidence. Tu comprends? Oui monsieur, j’ai répondu chevrotant à mon tour: ce fut une coïncidence sans aucune justification cognitive! Les visages tourmentés d’un Ixion, d’un Prométhée, d’un Marsyas passèrent devant mes yeux écarquillés d’horreur. Tous furent férocement punis par les Olympiens pour des peccadilles. Ixion par exemple il voulut seulement coucher avec Héra. Il n’a rien fait! Si on va châtier tous les rêves porno la terre va se vider et même les gens d’Église…voilà !Je vais aller à mon âge me crêper le chignon avec une coterie des Dieux à la fois décédés et particulièrement rancuniers ? Il y a une limite à la folie, ma foi ! Ce fut une coïncidence, à l’envers de toute réflexion, rumination ou recours. Qu’on se le dise…
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